Better Watch Out, où la magie de Noël n'existe pas
Comme seuls cadeaux, un huis-clos et des couteaux
Note : même si j'ai essayé d'écourter cette chronique pour ne pas dévoiler l'intrigue, je vous conseille de regarder le film avant de la lire si vous voulez profiter de l'expérience au maximum. Et surtout : de ne regarder ni le trailer ni les images promotionnelles.
Vous connaissez Maman, j'ai raté l'avion ! ? Film de Noël par excellence qui raconte l'histoire de Kevin McAllister, enfant laissé par inadvertance seul dans la maison parentale, et qui doit se défendre contre des cambrioleurs ? Maintenant, faisons travailler votre imagination. Tout d'abord, enlevez l'aspect familial. Imaginez aussi que ce sont pas des malfrats simplets auxquels doit faire face notre héros, mais des tueurs sanguinaires. Et qu'il ne doit pas simplement les étourdir ou leur faire peur, mais bien leur péter les genoux, voire pire. Vous avez cette image en tête ? C'est ce que promet Better Watch Out, sorti en 2017. Ou du moins le croyait-t-on…
Nous sommes quelques jours avant le 25 décembre. Dans les rues enneigées d'un quartier résidentiel retentissent les cris de joie des enfants. Ils roulent dans la poudreuse, se relèvent, puis courent jusqu'à en perdre haleine, leur luge brinquebalante derrière eux. Zoomons sur une maison que rien ne distingue des autres. Sur le toit, les silhouettes de deux rennes aux entrailles remplies de leds côtoient un sucre d'orge à taille humaine. Sur la porte blanche immaculée, une couronne. Rentrons à l'intérieur, et écoutons.
Deux enfants d'une douzaine d'années, Garrett et Lucas, discutent. Le sujet : la meilleure manière pour ce dernier, dont c'est la maison, d'emballer sa babysitter de dix-sept ans qui doit bientôt déménager. Malaise. Pendant ce temps, les parents se disputent, à coup de petites saillies vulgaires, remettant en cause la sexualité de l'un puis de l'autre. La magie de Noël semble déjà loin, et la barre de navigation affirme que nous n'en sommes qu'à cinq minutes de film. Les adultes partis, Ashley, la babysitter débarque. Lucas commence à se sentir un peu trop à son aise et, l'alcool aidant, la soirée devient rapidement gênante. Puis carrément dangereuse lorsque des intrus non-identifiés tentent de pénétrer dans la maison. Et si sous des apparences simples, se cachait quelque chose de bien plus compliqué ?
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Arrête-moi si tu peux
Une brique vole à travers les carreaux, des ombres se détachent à la fenêtre, les téléphones et la voiture sont inutilisables. La montée en puissance est plutôt intrigante, mais quelque chose cloche. Tout sonne faux, trop évident. Lucas se prend pour un héros, les motivations des malfaiteurs sont floues, les jump-scares anodins. Petit à petit, on pense deviner ce qui est véritablement en train de se jouer dans cette maison. Et c'est le moment que choisi Better Watch Out pour renverser tous ses enjeux et partir dans une direction totalement différente.
Pas le temps pour des explications, vite expédiées. Le film embraye directement sur sa seconde partie, qui s'éloigne du home invasion, un sous-genre de film d'horreur, traduisible littéralement par l'invasion d'une maison. Et tant pis si certaines incohérences restent (le réseau téléphonique ?). Mais reconnaissons qu’on aura le droit à des réponses au fil du temps, lorsque l'on découvre pourquoi certains éléments étaient si perturbants dans la première partie. Et si vous étiez déjà gênés par le relation quelque peu perverse de Lucas avec Ashley, vous n'êtes pas prêt pour ce qui va suivre. Le malaise est tellement présent qu'à plusieurs reprises mon doigt a frôlé la flèche pour accélérer la lecture. La faute, ou plutôt grâce, à d'excellentes performances de la part des deux jeunes acteurs et de l'actrice, qui ont tous travaillés de pair avec le réalisateur australien Chris Peckover pour rendre leurs personnages vraisemblables. À la manière d'un Norman Bates, le méchant principal, lui, psychopathe et manipulateur, ne fait pas dans la substance. Quitte à en faire trop et frôler le ridicule.
Vous comptiez sur quelques secondes de répit ? Le film ignore ce mot, il ne nous lâche pas. Face aux multiples retournements de situation qui mettent à mal nos personnages, même quand on les pense sortis d'affaire, on est angoissé, poussé dans nos derniers retranchements. À tel point qu’on a une seule envie, que tout s'arrête. Et quand on pense enfin être tranquille, une scène abrupte placée au milieu du générique laisse planer le doute sur la fin.
Vive le sang d'hiver
Ce n'est pas la première fois qu'un film d'horreur utilise la période des fêtes pour placer son décor. On peut citer par exemple Black Christmas, ou Silent Night, Deadly Night, dont je vous recommande l'épisode qui y consacré par Chroma et Karim Debbache. Mais ici, Noël est véritablement plus une toile de fond, un cadre qui n'a finalement pas grand intérêt, hormis à un ou deux instants, lorsqu'il se révèle utile pour faire avancer l'histoire ou monter la tension. Better Watch Out, même s'il ne se révèle être un film qui fait dans la surenchère en utilisant un peu trop d'artifices, reste captivant. Il développe des propos inhabituels pour le genre, qui montrent une vraie compréhension de problématiques sociétales. Sur la perte trop rapide d’innocence des enfants aujourd’hui par exemple, les relations avec les adultes ou les conséquences de la construction d'une identité qui prend pour référence des personnages fictifs.
Et d'autres, que je me garderais de dévoiler ici.
Le film est bien plus qu'il ne parait et surpasse sa promesse originale. À conseiller si vous cherchez à pimenter vos vacances de fin d'année, à vous déstabiliser et que vous en avez marre des long-métrages mièvres et plein de bons sentiments qui passent sur la TNT en cette période de fêtes. Dans Better Watch Out, la magie de Noël n'existe pas.
Sur ces bons mots, il ne me reste plus qu'à vous souhaiter de joyeuses fêtes, soyez prudents, protégez-vous et vos proches. On se dit rendez-vous à la fin du mois pour la dernière newsletter de l'année !
Rémy
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